La façon dont nous interagissons avec le web est sur le point de connaître une transformation radicale. Microsoft et Cloudflare viennent d’annoncer un partenariat qui pourrait redessiner les contours de notre expérience en ligne. Fini le temps où nous nous contentions de cliquer sur des liens après une recherche. L’ère des sites web capables de dialoguer directement avec nous et avec les intelligences artificielles est désormais à notre porte.
Résumé de l’article
- Partenariat stratégique : Microsoft et Cloudflare s’allient pour transformer les sites web en interfaces conversationnelles directement interrogeables en langage naturel
- Technologies déployées : NLWeb (Microsoft) pour les points d’entrée conversationnels + AutoRAG (Cloudflare) pour l’indexation automatique du contenu
- Nouvelle expérience utilisateur : dialogue direct avec les sites pour obtenir des réponses précises
- Enjeu concurrentiel : tentative de rééquilibrer les forces face à la domination de Google en repositionnant les sites comme services interrogeables
- Défis à relever : qualité des réponses, traçabilité des sources, coexistence avec les usages web traditionnels et adaptation des modèles économiques
Une alliance stratégique pour un web conversationnel
Le géant de Redmond et le spécialiste de la sécurité cloud unissent leurs forces pour développer une architecture permettant aux sites web de devenir des interfaces conversationnelles. Cette collaboration n’est pas fortuite – les deux entreprises avaient déjà travaillé ensemble sur des questions d’exploration de contenu et de gestion des robots, jetant les bases de cette nouvelle approche.
L’objectif est ambitieux : permettre à n’importe quel site d’être directement interrogé en langage naturel, sans passer par l’intermédiaire d’un moteur de recherche traditionnel. Cette évolution répond à un besoin grandissant des utilisateurs qui préfèrent obtenir des réponses directes plutôt que de naviguer entre plusieurs pages.
SEO / AEO : un changement de paradigme
Cette initiative marque l’émergence d’un “nouveau” concept, qui n’est pas si nouveau en SEO car les bases ont été posées il y a longtemps : l’AEO (Answer Engine Optimization), qui pourrait progressivement prendre davantage de place dans le SEO (Search Engine Optimization) que nous connaissons tous. Alors que le SEO traditionnel vise principalement à positionner un site dans les premiers résultats d’une recherche sur un moteur, le travail sur la solution de Cloudflare et Microsoft va plutôt chercher à structurer le contenu pour qu’il puisse fournir des réponses précises et exploitables. Rien de bien différent avec ce que l’on fait déjà, mais les formes de contenus risquent de varier énormément pour répondre à l’ensemble des besoins des LLM, agents et moteurs traditionnels ; et tout cela sans altérer ni la qualité de l’information, ni la satisfaction des utilisateurs.
L’enjeu n’est plus seulement d’être visible dans les résultats de recherche, mais d’être compréhensible par les agents d’IA et de pouvoir fournir des informations directement exploitables. Cette approche modifie profondément la manière dont les créateurs de contenu devront penser leurs sites web et leurs formats à l’avenir.

NLWeb et AutoRAG : les briques techniques de cette révolution
Sur le plan technique, Microsoft déploie NLWeb, un système permettant d’interroger un site via un point d’entrée conversationnel (généralement accessible via une URL de type “/ask”). Cette technologie transforme n’importe quel site en une interface capable de dialoguer avec les utilisateurs et les agents d’IA.
De son côté, Cloudflare apporte AutoRAG, une solution qui analyse, découpe et indexe automatiquement le contenu d’un site pour le rendre interrogeable. Le système utilise la technique de RAG (Retrieval-Augmented Generation) pour fournir des réponses contextualisées et précises. Cette technologie s’apparente aux connecteurs que l’on trouve dans ChatGPT ou aux intégrations de Gemini avec les services Google.
La mise en œuvre semble avoir été pensée pour être simple. Les propriétaires de sites peuvent activer cette fonctionnalité depuis le tableau de bord Cloudflare, via une option “NLWeb Website Quick Deploy”. Le processus se déroule en trois étapes :
- Connexion de la source de contenu
- Lancement de l’indexation
- Exposition du point d’entrée conversationnel
Une gouvernance repensée pour l’ère de l’IA
Au-delà des aspects purement techniques, Microsoft et Cloudflare ont intégré des mécanismes de gouvernance qui définissent qui peut accéder à quelles informations et dans quelles conditions. Cette dimension est cruciale à l’heure où les craintes concernant l’utilisation des contenus par les IA se multiplient.
Ces garde-fous permettent aux éditeurs de sites de garder le contrôle sur leurs contenus tout en les rendant accessibles aux agents automatisés. Ils favorisent également la traçabilité et l’attribution des informations, deux aspects essentiels pour maintenir la confiance dans l’écosystème numérique.
Un nouvel équilibre des pouvoirs sur le web ?
Cette initiative peut être interprétée comme une tentative de rééquilibrage des forces sur le web, dominé depuis des années par Google et le modèle général basé sur le crawl, l’indexation et le classement. En proposant une approche centrée sur les réponses directes, Microsoft et Cloudflare espèrent redistribuer les cartes.
Cloudflare a d’ailleurs récemment appelé à une séparation claire entre l’indexation classique et les fonctionnalités génératives d’IA, notamment chez Google. Cette prise de position illustre la volonté de l’entreprise de redéfinir les règles du jeu en faveur des éditeurs de contenu.
Ce partenariat positionne les sites web comme des services interrogeables plutôt que comme de simples destinations. Les éditeurs retrouvent une place centrale dans l’expérience conversationnelle, avec un meilleur contrôle sur l’accès à leurs contenus et leur attribution.
Défis et perspectives d’adoption
Si la vision est séduisante, plusieurs défis restent à relever pour que cette approche s’impose largement :
- La qualité des réponses générées devra être irréprochable
- L’attribution des sources devra être transparente pour maintenir la confiance – ici, on peut facilement répondre au besoin de redéfinir des KPI, mais la source de trafic initiale (celle qui a mené à la question posée) restera encore difficile à tracer
- L’intégration avec les pratiques existantes de recherche devra être fluide
- Les modèles économiques devront s’adapter à cette nouvelle réalité
L’adoption massive de ces technologies dépendra également de leur capacité à coexister avec les usages traditionnels du web, profondément ancrés dans nos habitudes. La transition vers un web conversationnel ne se fera pas du jour au lendemain, d’autant plus que ces fonctionnalités seront très dépendantes du trafic entrant (en tout cas dans un premier temps).
Néanmoins, dans un contexte de saturation informationnelle, la promesse de sites capables de nous répondre directement, sans détour par les moteurs de recherche, représente une évolution potentiellement majeure de notre relation au web. Elle pourrait permettre des interactions plus naturelles et efficaces, tant pour les utilisateurs humains que pour les agents d’IA qui nous assistent au quotidien.
Microsoft et Cloudflare semblent avoir pris une longueur d’avance dans cette course vers un web plus intelligent et conversationnel. Reste à voir si cette vision deviendra la norme ou restera une alternative parmi d’autres dans l’écosystème numérique.
Ce que l’on peut d’ores et déjà pressentir, c’est que cette “indexation locale” pourrait être le premier pas vers une API d’interrogation capable d’être connectée directement aux moteurs de recherche traditionnels ou aux LLM et agents conversationnels, permettant alors de récupérer à distance les informations directement depuis les sites participant… L’avenir nous le dira !
Source : https://www.clubic.com/actualite-577668-microsoft-prepare-l-ere-post-seo-avec-cloudflare.html